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mardi 28 novembre 2017

JUDOCRADE

Sportif halitueux pratiquant le combat en souplesse et usant de son odeur corporelle pour affaiblir l'adversaire.


   Ça sentait sur les tapis comme dans les vestiaires la même odeur piquante de caoutchouc chaud et de chaleur humaine qui tenaillait les narines. Aussi je tentais de respirer le moins possible.
   La plupart de nos gestes étaient lents, appliqués. Il régnait là comme une sorte de sérénité silencieuse, presque religieuse. Nous étions tous revêtus du même pyjama trop large fait d'un tissu à l'épaisseur indestructible par lequel nous nous agrippions tour à tour avec la même détermination paisible.
   A mon tour je fus prise en charge par la grande armoire sombrement ceinturée qui aussitôt m’empoigna au colback en m’invitant à faire de même, et nous commençâmes à valser quelques instants au milieu des autres dans le silence d'une musique intérieure qui semblait totalement improvisée tant son rythme m'échappait. Puis, sans que l’on sache pourquoi, il se prit les jambes dans les miennes avec une maladresse déconcertante tout en me pressant lascivement contre lui, comme si nos deux cœurs eussent été entrelacés, jusqu'à ce qu’au bord de l'asphyxie je fus enfin retournée comme une crêpe et plaquée au sol avec une brutalité dont la prestesse contrastait avec l’indétermination presque tendre de notre précédente embarrassade.
   C'est ainsi que je disparus sous l'imposant judocrade velu qui ne relâcha point son étreinte tandis qu'il m'écrasait consciencieusement la poitrine en me tordant le bras.

(Zoé ZANTAILLE, Terreurs de jeunesse : Journal d’une aspergirl)

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