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mercredi 31 mai 2017

HUMANIMALCULE

Individu pétri du sentiment de son insignifiance.


Quoiqu'on fasse on sera ces humanimalcules
Qui fourmillent de riens tout aussi minuscules.
Alors on bat la donne, on croit au jour levant,
On dromomanigance, on fuit en poursuivant
Ce qui pourrait enfin dans cette incertitude
Combler un tant soit peu notre solicitude ;
Et l’on estragonise en vladimirôdant,
On ingamberge en masse, on piaffe en redondant
Pour donner par le biais de nos vicissitudes
Une forme nouvelle aux grandes habitudes.

(Samson d’ALLUNELLE, Méditations hypnothétiques)

mardi 30 mai 2017

INSÉCURIOSITÉ

Soif de découverte contrariant tout assouvissement intellectuel.


   Écrire doit être ce qui vient mettre en péril ce que nous poursuivons malgré nous d'idéal de bien-être qui achève de nous museler, et non pas “muscler” comme une coquille persistante tendrait à le souligner.
   Écrire, c'est le mouvement de l’insécuriosité nécessaire. C'est ça. Parti pris d’une angoisse perpétuelle, courage pris à une main du geste de la seule parole dans l'imperceptible brouhaha, grand désœuvrage organisé pour un terme indéfini, rodéo à cru de phrases éreintantes pour qui veut percer le fond par la forme, mais pour qui la pertinence de la forme a cessé de suffire.

(Doralisa PYRARGNE, Savoir comment savoir)

lundi 29 mai 2017

JUVINYLE

Disque microsillon de la première adolescence, aux gravures souvent inavouables.


   Des piles parfois renversées ou torsadées de juvinyles désormais silencieux encombraient toujours cette partie du grenier, débris inertes d'une insouciance égarée, ruines antiques d'une musique oubliée entre lesquelles les araignées avaient échafaudé au fil du temps un écheveau tout aussi silencieux de toiles souples mais savamment contreventées.

(Guilbert FLACHTAFF, Salambovariations)

dimanche 21 mai 2017

LILLIPRUSSIEN

Surnom donné aux soldats allemands qui déferlèrent un soir de janvier 1871 pour se protéger du froid mais qui, faute de matelas déjà réquisitionnés, passèrent la nuit sur les marches des petits escaliers d’habitation.


Férocement vautrés, la crosse entre les cuisses,
Les lilliprussiens, par pleines garnisons,
Font gargouiller la nuit le ventre des maisons
Avec des rêves lourds de bière et de saucisses.


LILLIPRUSSIEN (Arthur Rimbaud) "Arabécédesque, Olivier Goldsmith"

MÉDITHAÏTION

Médithaïtion (Arabécédesque, Olivier Goldsmith) Thaïs Massenet


Exigence mystique éprouvée à l'issue d'une partie de débauche.


Elle sentit frémir en elle,
Puissante exhortentation !
L’obscure et brûlante étincelle
D’une médithaïtion.

(Brice CABANON, Candélice)

vendredi 19 mai 2017

NAVILIVRE

Objet de lecture avec lequel on s’embarque durablement.


   Dois-je être lasse des lectures rêvassantes, rêvassommantes, quand le ronronnement des phrases me berce et que le sens m’échappe parce que telle expression initiale, telle formule uppercutante, a orienté mon attention vers une direction qui m’est propre ?
   Ainsi je m’écarte de l'auteur parce que l'auteur insinue malgré lui l’opportunité d'un cheminement qui devient le mien tout en continuant le sien. Ainsi je largue d’être larguée : je deviens fantôme hantant les discoursives d’un navilivre à destination fluctuante : je m'échappe de la prison : mes regards se perdent au-delà des barreaux de la cellule dont je détiens les clés : je m’approprie ce lieu d’enfermement pour l'accommoder à ma façon.
   Je continue de lire : j’imagine entièrement l'ouvrage que je suis en train de lire. J’ai besoin de cette prison pour nommer, connaître ma liberté : j’ai besoin de ce livre devenu inachevable, inachevé, de la résistance de ces parois de phrases allant s’épaississant pour m’y sentir rebondir : y capter l’écho de ce que je veux y trouver de ma présence évoisive, de ma présence évaseuse, de ma présence rêvadée, seul sujet de tout livre : étancher la soif inextinguible que j’ai de moi-même : insensible écriture de lectrice aveugle, accaparesseuse de phrases qui n'ont plus à mes yeux d'autres limites qu'une page qui redevient blanche le temps de la lire, et que sans le vouloir je froisse et je déchire.

(Lucie FERCATLEYA, Le papier se digère très bien)

jeudi 18 mai 2017

ORDINAUTEUR

Écrivain de production régulière et formatée.


Plein la gueule t’en prends. L’ordinosaure en berne
Te plante tôt ou tard dans ton siècle essoufflé.
Crache ton disque mou, cervelle démoderne,
Dégueule un peu ta merde, esprit recalculé !

Ordinauteur branché sur un chant de sirène,
Snobsolète en plein stress d’encéphallus fécond,
Emballe-toi, vas-y, sans craindre la migraine :
Montre-nous le talent de ta verve à la con !

(Slamilio DIDLÉO, Zazâme)


léo Ferré "Ordinauteur" https://arabecedesque.blogspot.com

PARAPHRASOIR

Lieu fastidieux de tous les débordements discursifs.


   Cette obsession d’une écriture qui nous ressemblerait, qui cesserait d’être une autre que la nôtre, avec les mots qu’il faut, ces mots d’entre les mots détachés du grand paraphrasoir ambiant, puis sassés par le silence, cette intensité des interlignes, espace de liberté par où les mots nous reviennent transformés.
   Écrire, c’est toujours trop tard de le faire, mais c’est ce qui en demeure qui importe : une vague plus qu’une autre sur une mer devenue étale à force d’immensité.
   Il n’y a jamais que des miettes d’être en vie. Sinon c’est que ça ment.

(Albin FIERONID, Les ecchymots)

mardi 16 mai 2017

RAVIRE

Provoquer l'hilarité d'une personne en dépit d'elle-même.


CLITASTE
Ah ! j'en ay dit assez pour vous plaire en ces lieux !
Si le respect m'inspire, autant il m'enmuselle…
Mais vous riez, Monsieur, des effets de mon zele.
En voguant jusqu'à vous afin de vous servir,
Me rens-je ridicule à vouloir vous ravir ?
Je n'avois point pourtant dessein de vous ravire.

MALCESTE
Vous vous repépétez, Monsieur le beau navire
Qu'une eau calme chavire aprés tant d'ouragans.
Mais je n'useray pas d'effets extravagans :
L'eau de mon bain suffit à vous-mesme à vous rendre
Car je nage fort mal dans cette mer de Tendre
Pour espérer, Monsieur, vous ravire à mon tour
En m'en purgeant la teste avec autant d'humour.

(Jean-Pierre MORLŒILLE, L'amy de trop)

STRATOCADE

"STRATOCADE" (Galacco) https://arabecedesque.blogspot.com


Attachement exclusif pour un type de guitare.


   Du tranchant ignitié brûlant à fleur d’en rompre, éloigner bientôt le couteau du chevalet à dessein d'allonger la pâte plus rondement. Stratocade : straccato, puis stratoccata legato confirmant tout modelé courbe. Trémodulation, frisson au point chaud remontant le long des bras pour redescendre par l’échine. Imaginer des touches inexplorées pour peu que l'on tende l'oreille un peu différemment du côté des baffles. Promesse d'une manne plus intime à décrypter par le silence intérieur, qui suscite à lui seul l'orage désiré avant qu'il ne s'épuise dans les lassitudes de la banalité.

(Grégoire GALACCO, L'axe bleue)

lundi 15 mai 2017

TÉMESTABLISHMENT

Industrie pharmaceutique florissante.


Au royaume éhonté du médicamenteur,
Leader d’assuétude aux talents de dealer,
Nous voyions s’entasser dans les salles d’attente
Du témestablishment la manne consultante.

(Raoul AMADINE, Les médications stochastiques)

dimanche 14 mai 2017

VRACCORD

Combinaison de notes échappant à toute analyse harmonique rigoureuse.


Quand le leitcomotiv s'emporte sans bagage,
J’introduis mes vraccords si peu distinctement
Que la confusion de mon tempérament
Est comme un chant d'oiseau recréant son plumage.

(Pierre-Nicolas JARRETTE, Moodelettes)