Rechercher dans ce blog

vendredi 7 septembre 2018

UBICOQUITÉ

Fait d’avoir plusieurs domiciles occupés simultanément.


   C’est au mois d’août que ça se complique, la chaleur aidant. L’afflux des voyageois, ces faux adeptes de l’ubicoquité, chamboule l’espèce sédentaire, apportant tant angoisse sourdement orageuse et méfiance instinctive de cet inconnu venu de nulle part qu’attrait mystérieux de ce lieu-non-dit, ce vent chaud d'indéfini dense fait de prunelles ardentes et de roulottes désuettes, d’osier et de guitare manouche. Cette météo des hommes invariablement prévisible qui fait chaque fois l’hiver plus froid, plus figé dans les habitudes rabougrelottantes ; fait du patelin encrassiné ce lieu-dit toujours plus désertant.

(Léselle HULOCOT, Les gens du village et les voyageois)

dimanche 2 septembre 2018

Popol et son catin

Popol et son catin Arabécédesque "Olivier Goldsmith"


   Popol et son catin qui lui n’apprécie la picole que pour choquer les verres dans l’ivresse scandaleuse et spectaculaire. Pose, pause. Chacun attend car l’immobilité n’existe pas : Popol distrayant son gosier devant et derrière son ballon avant que le coq ne chante, dans l’impatience secrètement incontinente de dévorer tout cru la poésie messianique et son pilote d’essai qui, las des tétons laids, gerba naguère les petites amoureuses éclenchées pour s’abandonner faussement pensif aux déduits émérotiques alors scandaleux, couronnés bientôt par les épines émoussées de la gerbe finale. 
   "Venez, chère grande âme : on vous attend !"... Quelle invite moins préoccupante pour les vertueux apeurés que nous sommes ?
   En attendant, voyez comme il se penche vers son Popol pour lui grignoter l’âme et incendier sa tripe des jadis coupables délices pour mieux l’accabler ensuite des affres de sa dépopolisation : trop relou le Popol ! Le fait est, nul ne ressortira indemne, comme dit Eugène, des terribles loisirs que leur amour leur crée. Jouir c’est souffrir sans le savoir, et tant pis pour après. Le maso diffère en cela juste que, le sachant, il pose la vérité comme préalable (en tant que vertueux effarouchés évitons ainsi le terme "fondement", ayant précédemment abusés par deux fois du mot "âme"). Mais il n’est pas indispensable d’être maso pour faire un bon pilote d’essai qui, comme on sait, sait qu’il ne sait pas encore.

vendredi 31 août 2018

AUTOMOBILIEUX, EUSE


Chauffeur pratiquant couramment l'intolérance routière.


Sçachant toujours conduire où ses nerfs le conduisent,
Irresistiblement, l'automobilieux
Pousse au cul des trainards & se rend odieux,
Croyant que sur sa route où son humeur arbitre
On vient contre son droit se conduire en huître,
Et trainer à son nez des chandelles sans but
Qui le poussent encore à grossir le mot zut.

(Colin FLÉHAUT-DUPRÉALÉpitrodes)

mercredi 29 août 2018

BAGARER (SE)

Chercher désespérément une place de stationnement.


   Cette place toujours à prendre sur laquelle se jeter comme sur un morceau de viande. C’est toujours pareil : te bagarer, trouver à tout prix, ta place, jamais la même, mais tu ne la trouves pas. Alors tu tournes, tu tournes, tu passes, tu repasses, t’arrêtes, ça se libère là-bas, trop tard, tu repars, t’arrêtes, ça s'agace derrière, pas assez de place. Alors tu repars comme si tu n’arrivais plus à rejoindre aucune rive.
   En attendant ça va de plus en plus mal. Tu tournes comme une bourrique, fais tourner les autres en bourrique de vouloir cesser de tourner comme une bourrique. Quelle ânerie cette place, celle qui n'est toujours pas la tienne !
   De plus en plus inconsistante, tu dérives dans l’angoisse d’une panne qui t'immobiliserait pour de bon. Tu deviens conne.
   Conduite déviante. Quelle place cherches-tu vraiment, là ou ailleurs ? Quelle place avais-tu réellement hier ? avant hier ? C’est toujours pareil : rien n'est jamais comme avant, comme si chaque fois il fallait tout recommencer. Alors tu dis que c'est de la folie, que tu deviens folle. Il faudrait le devenir vraiment : ça c'est une place à prendre. Pour la garder.

(Ordalie CAMPÈLE, Nerveuse le matin)

samedi 25 août 2018

CAMBROUSSAILLE

Coin de campagne très reculé avec maisonnette.


Helas ! je doy quitter ma sombre cambroussaille,
Dans l'odeur de metro reprendre mon employ ;
Je doy fuïr mes bois pour ramener de quoy
Réparer ma Toiture & dormir sur ma paille.

(Jacques DUBOLÉ, Les villettrez)

mardi 21 août 2018

DÉBRIBE

Débribe (Arabécédesque, Olivier Goldsmith)


Vestige inutilisable d’une chose détruite, disparue.


Après l'électrochoc si bien civilisé,
Ce n’est plus que désert, que nuit blanche, que quête
De débribes sans noms d'un grand vase brisé,
D'un je-suis étété qui rôde dans la tête.

(Raoul AMADINE, Les médications stochastiques)

vendredi 17 août 2018

ÉCLATENCE

Prévalence de l’invisible.


Tranchant qui s’émousse
Au plain de l’abîme

Vieille lame reflet pourtant
De l’éclatence qui le rendrait
À sa première entaille

Aux yeux aveugles de qui frémit
De tant d’absence qui le forge

(Violain DURQUIGNON, L'encrazur)

lundi 13 août 2018

FLOSCILLER

Onduler en miroitant.


   Partout elle aveuglait tant elle resplendissait d'étoffes précieuses. Tourmentante autant que tourmentée, elle paraissait danser, mirage obsédant, et son corps devenu irréel d'immobilité floscillait dans la lourdeur sérale, orageuse et tremblante.

(Guilbert FLACHTAFF, Salambovariations)

samedi 11 août 2018

GLUMIÈRE

Pénombre pesante.


C’est la clé posée là
Sur la toile cirée poisseuse

Dans la glumière alourdie
Par l’odeur des torchons

Et la porte côté couloir
Close comme si déjà

(Guénolé VICQ, Cancre)

mercredi 8 août 2018

HÉBÉANTÉ

À la merci d’une attirance sans merci.


C’est une mare sans diable
Sinon que dans le fond
Du noir qui pue et qui fait peur


Mais dont on ne sait pourquoi
Si tiède la vase molle est douce

À recevoir qui en rêve
Les yeux ouverts hébéantés
Par tant de nuit improvisée


(Guénolé VICQ, Cancre)

lundi 30 juillet 2018

INVENTATION

image alien sight Twitter (Arabécédesque, Olivier Goldsmith)


Source puissante d’imagination.


Ce qui fait que la mer est l’inventation
De l’homme inachevé qui s’obstine et s’épuise
Au souvenir perdu de sa création
Pour retrouver l’écrin qui l’invente à sa guise.


(Samson d’ALLUNELLE, Méditations hypnothétiques)

lundi 23 juillet 2018

JASPINTER

Consommer des boissons alcoolisées avec un fort débit de paroles.


   Force est de constater que dans les bistrots ça papote, ça jabote, ça jacasse et, pour tout dire, ça jaspinte plus qu’ailleurs, sans doute à cause de la chaleur humaine provenant de l'alcool, et parfois il arrive même qu'on y éclate de rire. Les bistrots de France sont le temple de la convivialité, et c'est pour ça que ce jour-là je suis entré et que j’ai failli être colleté par mon voizinc parce que j'avais osé lui offrir un verre.
   Ça ne se fait pas de parler aux gens qui ne vous connaissent pas, d'être poli si ce n'est pas pour autre chose. Parfois ils s'offusquent, se dressent brusquement comme des cobras si vous succombez à la tentation de leur parler. Alors, le plus souvent, je me vois contraint à des échanges très ponctuels, demander l'heure ou mon chemin comme si finalement je ne savais jamais où aller, mais chaque fois cela m'autorise une formule de politesse appuyée d'un sourire bref, de peur d'avoir l'air d'en faire un peu trop.
   Ce chemin qui mène aux autres, c'est toujours le plus dur à trouver. C'est pour ça qu'il faut tout le temps demander.

(Amal GAJARRI, Sparabras)