Images : Jean-Marc GODÈS.
Reconduction de projets délibérément chimériques.
— Et si vous aviez un livre à emmener sur une île déserte ?
Toujours cette question mémorablement insipide aux réponses fatalement de même eau.
Si c'est pour quinze jours, le livre en cours. Si c'est pour toujours, n'importe lequel à partir de quoi n'importe quoi puisque où nulle part à la fois partout, étant pour toujours, le seul écho d'une phrase suffisant désormais à tout reste possible, à toutes les cogitérations, à tous les recommensongements à force d'en relire pour y reluire sans cesse de tous les livres manquants qui ont marqué, et d'autant plus l'inverse.
Un même livre ne sera pas le même pour quinze jours que pour toujours. Le livre pour quinze jours n'est jamais que le livre d'un jour, quand bien même durable d'airain. Le livre pour toujours ne procède plus que de son propre inachèvement : refermé dans un coin, il continue d’œuvrer de tout ce qu'il y a d'enfoui au profond de ses phrases : travaille continuellement : est sans cesse biblu, même dans le sommeil : amène en permanence à l'extension de lui-même avec toute la démesure d'un enfantillage salvateur infiniment perpétré.
(Lucie FERCATLEYA, Le papier se digère très bien)
Jean-Marc GODÈS :
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