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mardi 3 septembre 2019

RÉPITIÉ

Geste passager d’humanité octroyé de guerre lasse.


Les flots sont pleins de haine et jettent sur nos flancs
L’Hydre sans répitié de leur vague démente,
Et le vent est si fort qu’on voit les goélands
Voler à reculons dans l’énorme tourmente.

Charles BAUDELAIRE  "Arabécédesque : RÉPITIÉ" (Olivier Goldsmith)

mercredi 28 août 2019

SONNEPTÉNAIRE

Poème à forme fixe composé de quatorze heptasyllabes justifiés de vingt-huit caractères, espaces comprises, de coupe 4/3 pour les deux quatrains sur quatre rimes, et 3/4 pour les deux tercets suivants sur trois rimes. Le respect des règles de versification classique, reine mère des contraintes, n'est pas tant une obligation qu'une politesse.


Repère un vers de sept pieds 
Qui t’emprisonne au problème 
Maint labyrinthe en toi-même 
Pour en froisser tes papiers 

Un truc chiant qui travaille 
Le cœur tout plein du dégoût 
De battre au vent et surtout 
Pour accomplir ta trouvaille 

Que d’un rien vraiment banal 
Naisse au jour l’objet final 
Par défis presque ordinaires 

Mais qu’ensuite après essais 
Il nourrisse à pleins succès 
Tes prochains sonnepténaires 

(Apollon KLOSTROGNIAMENTALK, Sonnepténaires)

mercredi 21 août 2019

TROMPRE

Faire du bruit par peur du silence, du noir.


Je vois nos descendants, qu’un même rêve exhorte,
Aller loin dans le ciel sonder leur propre nuit
Et, pour trompre à leur suite (ô silence où tout fuit !),
Des chevelus jouant de la musique forte.

(Hugo SPLECTOR, La fiente de l’Esprit)


                                        _____


Infatigablement nous allons dans un gouffre
(Bien qu’à la vérité nous y sommes déjà),
Et rien dorénavant ne peut nous retenir.
Et bientôt le jour tombe, emporté lui aussi ;
Déjà je vois la nuit sans étoiles, sans hommes,
Et l'avenir profond où s'abîme le monde ;
Déjà je sens sous moi la terre qui déverse,
Comme un tombeau glacé qui ne résonne pas…
Comme si… comme si rien n’avait existé…
Que sommes-nous ? que suis-je ? Un spectre, une ombre… une âme,
Ou bien quelque animal venu gratter le sol
Pour disparaître encore et encore, englouti
Dans l'insondable flot d'une mer sans rivage…
Faire du bruit par peur du silence, du noir :
C’est là le vain projet des âmes en souffrance
(Et le fait de tous ceux qu’on nomme des fêtards).
On pourrait dire ainsi « trompre » en inversant les lettres…
Et malgré tout j’entends l’abîme, le silence
Prolonger sans répit mes piaffements stupides…
J’entends… et puis j’écoute, en dépit de moi-même…
     (Il se fige. Temps de silence)
Une brèche est ouverte au milieu de mon ventre,
Et déjà l'eau s'engouffre à l'intérieur de moi.

(Chrisostome MARLOQUÊTRE, L'âme létale)

mercredi 14 août 2019

VIRONCHONNER

Tourner en rond, s'agiter en bougonnant.


J'étais comme on peut être amer et sans le sou,
Vironchonnant en vain en rêvant de tempête :
Quelque chose manquait qui me bourrait la tête ;
Et je compris alors que je n'étais plus soûl.

(Stanislas PHOLLION, D'une mer inconnue)

lundi 5 août 2019

Valise (Noël Talipo & Sguono Shivko)


VALISE


Que renferme, au grenier, la valise en carton
Que la poussière et le silence ont recouverte ?
D’un voyage elle garde une étiquette verte.
Seul a vu son trésor, fureteur, le raton.

Peut-être est-il venu se faire un gueuleton
De chiffes, de papiers, dans la malle entrouverte
Et, dans le paradis de cette découverte,
Combla-t-il son penchant de voyageur glouton.


Rongeur globe-trotter, raconte à l’enfant sage
Les océans bravés, les torrides rivages,
L’accostage aux pontons envahis de senteurs ;

Qu’imprégné du remugle exhalé de la malle,
Il s’invente un pays qui le laisse songeur,
Longtemps, au noir grenier de son âme brumale.


NB & OG

samedi 27 juillet 2019

ARIGIDITÉ

ARIGIDITÉ "Arabécédesque" (Olivier Goldsmith) Jean Racine BAJAZET


Intransigeance d’un esprit borné.



LÆTANIA
Juste Ciel ! ce Minus…

OXANNE
                                              Estoit mal rancardé,
Car depuis Ibrahim l'a si bien possedé
Que Raymond, sous l'effet d'une heureuse fortune,
A pû luy refiler sa Came contre Thune.

LÆTANIA
On est faites ?

OXANNE
                             Not yet. Chouette fatalité !
Car, chez un con pareil, toute arigidité
Vient prouver sa limite au cerveau qu'il héberge,
Et je sçauray fléchir un poireau qui gamberge.



(Jean-Rachid de CRAMPISTON, La came de chez Ibrahim)

mardi 16 juillet 2019

BOUILLONNIR

BOUILLONNIR "Arabécédesque" (Olivier Goldsmith) Jean Racine Iphigénie

Être en proie à un accès d’exaspération improbative.



GAGAMENTOWN
Hi ! hi ! Pleurons, pleurons cette Hostie innocente,
Puisqu'à ce sacrifice il faut que l'on consente,
Et nous aurons enfin le plus bel avenir.


CHILLA
Ces mitos ça m'vénere à faire bouillonnir,
Poucave !


GAGAMENTOWN
                      Doy-je craindre une voix menaçante ?
Ah ! que doy-je esperer d’une humeur si blessante ?


CHILLA
Ferm' ta gueule fombou, boloss, gros Porc, connard !
Tu crois que t'as le flow ? Sa race le crevard !
Tu crois que j'vay t'laisser niquer ta noble Fille ?
Gagatride, t'es trop le dossier d'la famille !
On va passer l'flambeau plustost à un Psyco,
Wesh ! on va t'expliquer que t'es juste un skizo
Qui revend des mégots avec ton Calchiotte
Pour t'payer du bedo, gros bastard, face d'ilote !


GAGAMENTOWN
Et vous mesme, ça va ?


CHILLA
                                               Tu clash' mal le daron.
Zyva, mon sang m’enjoins de t'péter la cheutron,
Mais je kiff’ trop Sissi pour t'exploser, ta Mere !
Pas vray, t'as le chiro qui grave déblatere.
T’es trop relou : j’te jarte, ô face de goret !
A d'autres reviendra de te couper l'sifflet.

(Jean-Rachid de CRAMPISTON, Sissigenie)

lundi 8 juillet 2019

CERTINEXACTITUDE

Certinexactitude  "Arabécédesque" (Olivier Goldsmith) Jean de La Fontaine


Fausse vérité soutenue opiniâtrement.



Ne point sçavoir permet d’apaiser nos souffrances :
Pour cela, nous forgeons aisement des croyances.
L'ignorance est souvent le ferment de l'espoir,
Et nous sçavons trop bien ce qu'on veut bien sçavoir
Pour affiner encore, à force d'habitude,
Ce Principe appelé certinexactitude,
Tant nous craignons tousjours connoistre vrayement
Ce que nous écartons de nostre pensement.


(Célestin RONCELARD, Les hymniquitez)

jeudi 27 juin 2019

DYSPHORREUR

Sensation immotivée de mal-être grandissant.


Un coup de blouz bat le cœur
Qui ne saurait le comprendre
Un tant soit peu dysphorreur
Si ce n’était tant de cendre

Tel un bourdon qu’un vol bas
Toujours plus lourd exaspère
Brouillard d’ardeurs cadenas
Soleil qui fouille incarcère

C’est de l’or pur des enfers
Qui des cieux passe les fers
Tord-boyaux pour les limaces

Goût de stupre et moite peau
Peur chauffant les carapaces
Et la mort veule à-vau-l’eau


(Apollon KLOSTROGNIAMENTALK, Sonnepténaires)


● Malaise paroxystique.


On ne peut s'empêcher de boire, écervelés 
Pour oublier jusqu'aux englouements enfiellés.
Sournoise dysphorreur des lendemains de cuite

Quand vivre vous réveille et vous torture ensuite.

(Jean-Alphonse de LA MOUSSOLAINE, Les élancoliques)

jeudi 20 juin 2019

ENCRICRINER

Lasser sévèrement son entourage par des mouvements d’archet inconsidérés.


Mais encricriner a du bon :
Je sais un air très populaire
Qu’il faut racler au violon
Si tu veux larguer ta rombière
Et rendre le chien furibond.



(Martin LEMIÈVRE, Les démasculines)

vendredi 14 juin 2019

FANFRELOUCHER

Prendre le pli de la surcharge décorative, de la joliesse convenue.


La beauté sans ouvrage est celle qu’on préfère ;
Celle qui nous travaille au miroir sans arrêt,
Nous rend silencieux puis nous rend solitaire
Devant l’inaccessible et supposé portrait.

Comme toujours on est tout près de ce mystère :
Ailleurs est la beauté qui nous ressemblerait.
Comment la dire alors à défaut de la faire ?…
Ainsi fanfreloucher entretient son secret !

Car on peut aisément tirer de la nature
L’
artifice idéal à donner en pâture
Aux esprits encombrés d’un pareil engouement

Pour vivre dans l’espoir d’une grâce formelle,
Et dans l'illusion d’un obscur dénouement
Sinon la mort à quoi chaque rêve se mêle.


(Samson d’ALLUNELLE, Méditations hypnothétiques)

jeudi 6 juin 2019

GLISSUER


Évoluer à grand peine sur un terrain fangeux, dangereux.


C’est un miroir informe, une flaque boueuse,
Terre vague et sans nom qu’on ne voit plus finir,
Comme un Paris-Roubaix à n’en plus revenir
Où la mort faucherait comme une mitrailleuse.

Avec 36 – 16, et souvent en danseuse,
Quoique tout soit si plat, il faut bien plus souffrir
Que s’il fallait grimper sans jamais aboutir,
Pour tracer vers le ciel sa route hasardeuse.

Alors on a le cul bien lourd comme un pavé,
Glissuant sur ce pan de ciel inachevé,
La tête dans la brume où brouiller ses névroses.

Faut être un peu maso, bougrogne-t-on parfois,
Tant l’on dure, affligé de notre propre poids,
En transpirant ainsi la matière des choses. 



(Christophe DURALUMAIN, La pourfuite du bonheur)